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L’Artisanat au 1er trimestre 2020, frappé de plein fouet par la pandémie Covid-19

  • Publié le 26.05.2020
L’Artisanat au 1er trimestre 2020, frappé de plein fouet par la pandémie Covid-19
Chambre des Métiers

Graphique 1 : Historique et prévision de l’indicateur d’activité du secteur de l’Artisanat, 2007-2020[1]

 

Prenant le pouls de l’Artisanat au mois de mars 2020, les résultats de l’enquête de conjoncture du 1er trimestre sont les premiers à prendre en compte les répercussions économiques de l’épidémie du Covid-19, dont l’ampleur définitive n’est à ce stade pas encore connue.

 


Ainsi, l’enquête de la Chambre des Métiers révèle que l’indicateur d’activité de l’Artisanat enregistre au cours des trois premiers mois de l’année 2020 une baisse de plus de 3 points. Or, d’après les prévisions, l’impact du coronavirus frappe de plein fouet les entreprises artisanales au 2e trimestre avec une baisse de 20 points de ce même indicateur. Si ce résultat se confirmait, il s’agirait dès lors de la chute la plus abrupte jamais observée depuis le lancement de l’enquête de conjoncture en 1986. Elle serait même plus importante que le pire recul enregistré lors de la crise financière de 2008, à savoir une diminution de 12,4 points au 1er trimestre 2009. Ainsi, la crise sanitaire aura mis fin à un cycle conjoncturel favorable, entamé depuis le 4e trimestre 2013, donc depuis plus de 6 ans. 

Si au cours de l’année 2019 l’indicateur d’activité stagnait à haut niveau, les signes précurseurs de la crise économique se dégagent déjà des résultats du 1er trimestre 2020. Or, ce sont surtout les prévisions du 2e trimestre qui laissent apparaitre l’envergure et les effets du confinement sur le secteur artisanal. Ainsi, seulement 7% des chefs d’entreprises estiment que l’activité va progresser au cours du 2e trimestre 2020 contre 64% qui indiquent le contraire. Le solde (différence entre le % de chefs d’entreprises indiquant une hausse de l’activité et de ceux déclarant une diminution) s’écroule donc pour passer de +16 points au 4e trimestre 2019 à -7 points au 1er trimestre 2020 et à -57 points au 2e trimestre.[2]

  

Graphique 2 : Prévision de l’indicateur de l’activité pour le 2e trimestre 2020

 

Par ailleurs, l’indicateur d’activité de l’Artisanat, dans lequel la construction occupe un poids très important, peut masquer des évolutions divergentes au niveau des différents groupes de métiers. Il faut souligner que tous les secteurs ont été/seront négativement impactés par la crise sanitaire, comme il ressort du tableau reproduit ci-dessous. Ce sont, d’après l’enquête de conjoncture, les secteurs de la communication et de l’alimentation qui semblent pour le moment résister un peu mieux. Au contraire, c’est le groupe « mode, santé et hygiène » (MSH) qui souffrirait le plus des effets du confinement.

La principale explication réside peut-être dans le fait que certains métiers de la communication (p. ex. les imprimeries) et l’alimentation (mis à part les salons de consommation obligés de fermer et le service traiteur ayant subi la disparition des activités de type événementiel) étaient autorisés à poursuivre leur activité, tandis que la plupart des autres branches étaient à l’arrêt, notamment la MSH (hormis les métiers de la santé).

 

Variation du solde de l’activité de l’Artisanat

   

1er trimestre

2020 

 2e trimestre

2020 

Artisanat en général -3 -20
     
Dont :  MSH -13 -30
Mécanique -6 -21
Construction -3 -20
Alimentation -2 -17
Communication -5 -11

Tableau 1 : Variation du solde de l’indicateur d’activité (moyenne mobile) par rapport au trimestre précédent

 

Une information importante que l’enquête de conjoncture – en tant qu’enquête de type qualitatif – ne peut pas fournir est la baisse du chiffre d’affaires due à la crise sanitaire et les restrictions imposées au niveau de la circulation de la population. Pour pallier à cette déficience, la Chambre des Métiers a réalisé d’autres enquêtes auprès de ses ressortissants[3]. Il en ressort qu’en moyenne le chiffre d’affaires a diminué de 54% en avril par rapport au même mois de l’année 2019. Pourtant, il existe des différences notables entre les diverses branches composant l’Artisanat.

 

Groupe de métiers

 Baisse du chiffre d’affaires

MSH 91%
Alimentation 61%
Mécanique 61%
Construction 53%
Communication 51%
Autres 50%

Tableau 2 : Baisse du chiffre d’affaires (Source : enquête CDM sur le Covid-19)

 

Par la suite, la situation économique des différents secteurs est décrite de façon plus détaillée en se basant également sur les résultats des deux enquêtes Covid-19 menées au mois d’avril.

 

Le secteur de la construction à l’arrêt forcé pendant plusieurs semaines

Après l’annonce gouvernementale de la fermeture obligatoire des chantiers et de l’arrêt des activités en date du 17 mars 2020, le secteur de la construction a été autorisé à reprendre ses activités à partir du 20 avril 2020. Il faut toutefois constater que la remobilisation a nécessité un certain temps et que le respect des mesures sanitaires strictes visant à endiguer la propagation du virus a un coût direct – p. ex. l’acquisition de matériel de protection – et conduit par ailleurs à des pertes de rendement sur les chantiers. Ces éléments auront inévitablement un impact économique sur la branche.

Par contre, l’« avantage » de ce secteur est que les commandes et projets n’ont pour la plupart pas été annulés, mais plutôt reportés dans le temps. Ainsi, la perte du chiffre d’affaires peut, le cas échéant, être (partiellement) récupérée à l’avenir.

Les résultats de l’enquête de conjoncture montrent que le carnet de commandes ne diminue que de 0,3 mois sur une année pour atteindre 6,5 mois au 1er trimestre 2020.

 

La mécanique : les show-rooms des garagistes fermés lors du confinement

Si les entreprises du groupe « mécanique » pouvaient continuer à travailler dans leurs ateliers, beaucoup d’entreprises de ce secteur, surtout les garagistes ont perdu une partie importante de leur chiffre d’affaires en raison du fait qu’ils étaient obligés de fermer les salles d’exposition au public. L’effet de la crise est très visible : le chiffre d’affaires du mois d’avril 2020 correspond à seulement 39% de celui réalisé au cours du même mois de l’année 2019.

Pour le 2e trimestre, les chefs d’entreprises prévoient, selon l’enquête de conjoncture, une baisse de 21 points de l’indicateur d’activité. Il reste à voir si les commandes non-réalisées lors du confinement peuvent être récupérées à l’avenir ou si la perte du chiffre d’affaires reste définitive.

 

« Mode, Santé & Hygiène » : à ce stade, le secteur le plus gravement touché par le confinement

Les résultats de l’enquête de conjoncture indiquent que le secteur MSH est celui qui subirait le plus les conséquences de la crise sanitaire. L’indicateur d’activité décroît de 13 points au 1er trimestre 2020 et, selon les prévisions, de 30 points au 2e trimestre. Ainsi, pour ce dernier, 95,3 % des entreprises prévoient une baisse de leur activité.

En moyenne, le chiffre d’affaires de ce secteur a diminué de 91% par rapport à celui du mois d’avril 2019. En plus, cette perte de revenus risque d’être irréversible parce que les commandes / rendez-vous annulés ne peuvent plus être rattrapés à l’avenir. Même si les entreprises ont récemment pu reprendre leurs activités, l’augmentation des coûts résultant de l’acquisition de matériel de protection et de la perte de productivité – liée à titre d’exemple aux restrictions imposées au niveau du nombre maximal de clients pouvant être accueillis - vont avoir un impact économique négatif. Le bilan des effets du coronavirus sur ce secteur est d’ores et déjà très lourd, mais les éléments cités ci-avant vont continuer d’avoir des répercussions défavorables sur la MSH.

Malgré l’octroi d’aides étatiques, il faut se poser la question si l’ensemble des entreprises de cette branche auront les capacités pour affronter avec succès les défis auxquels elles sont confrontées. Comme elles ont pour la plupart des marges bénéficiaires limitées en raison de la forte concurrence régnant dans ce secteur, il se pourrait que certaines d’entre elles n’aient pas suffisamment de réserves financières face à une baisse du chiffre d’affaires, d’une part, et des coûts fixes à supporter, d’autre part. D’où l’importance de dispositifs d’aides performants pour surmonter la période de crise.

 

L’alimentation : perte des activités liées aux salons de consommation et au service traiteur

L’alimentation en tant que secteur assurant une activité « essentielle » a pu continuer ses activités, même s’il faut souligner qu’en parallèle les salons de consommation ont dû être fermés et que le service traiteur a subi de plein fouet la disparition abrupte des activités de type « événementiel ».

L’indicateur d’activité n’a baissé « que » de 2 points sur les trois premiers mois de l’année 2020. Au 2e trimestre par contre, les résultats de l’enquête de conjoncture prévoient une chute de 17 points.

Avec une diminution du chiffre d’affaires de 61% au mois d’avril 2020 par rapport au même mois de l’année précédente, on ne peut certainement pas affirmer que l’impact de la pandémie soit négligeable pour ce secteur, loin de là. D’autant plus que les conséquences financières devraient laisser des traces sur une longue période, par exemple à cause de l’annulation de grands événements.

 

Communication : un impact divergent sur les corps de métiers de ce secteur

Comparé aux autres groupes de métiers, la communication semble à ce stade être un peu moins impactée par la crise avec une diminution prévue de l’indicateur d’activité de 11 points au 2e trimestre 2020.

Pourtant, le chiffre d’affaires a baissé de plus de 50% au mois d’avril comparé au même mois de l’année 2019.

Une explication possible pourrait résider dans le fait que les corps de métiers formant ce secteur ont été touchés à des degrés divers par la crise sanitaire : les photographes et les métiers du spectacle ont perdu leurs commandes liées à des activités de type « événementiel ». Eventuellement, les imprimeries et ateliers graphiques ont pu maintenir un niveau d’activité supérieur aux branches précitées.

 

Note générale : L'enquête de conjoncture de la Chambre des Métiers du 1er trimestre 2020 se base sur plus de 900 réponses d'entreprises artisanales. Les entreprises sont invitées à indiquer l’évolution des paramètres suivants pour le trimestre en cours et celui à venir : activité, emploi, carnet de commandes, prix de vente, chiffre d’affaires, situation de trésorerie, marge bénéficiaire et délais de paiement des clients. Le solde indiqué dans les graphiques représente la différence entre les réponses positives (p. ex. hausse de l’activité) et négatives (p. ex. baisse de l’activité) à une question spécifique du formulaire.

 

[1] Avertissement : contrairement aux résultats repris dans le graphique 1 reproduit ci-avant, les données commentées dans le présent paragraphe n’ont pas été lissées par le biais d’une moyenne mobile.

[2] Le graphique représente le solde des réponses positives et négatives, lissé à l’aide d’une échelle mobile sur 4 trimestres ; en d’autres termes, il s’agit de la différence entre le pourcentage de chefs d’entreprises déclarant une hausse de l’activité et ceux constatant une baisse.

[3] Covid-19 : quelles conséquences sur votre activité ?

 

Contact

Max Urbany

(+352) 42 67 67 - 261
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