Le Luxembourg a réformé et modernisé sa Constitution

  • Publié le 04.07.2023

La Chambre des Métiers félicite les chambres professionnelles pour leur intégration dans la Constitution luxembourgeoise réformée telle qu’elle est entrée en vigueur le 1er juillet 2023.


  1. Une œuvre de modernisation

L’article 128 (2) de la Constitution proclame que « La loi peut créer des chambres professionnelles, qui ont la personnalité juridique. » Cette phrase, par laquelle l’existence et l’indépendance des chambres professionnelles sont consacrées, s’inscrit dans l’objectif de modernisation terminologique et d’adaptation du texte constitutionnel à l’exercice réel des pouvoirs et au fonctionnement des institutions. Contrairement au doute que peut faire naître l’utilisation du verbe pouvoir dans les termes « peut créer », l’existence des chambres professionnelles n’est pas une simple possibilité mais une réalité centenaire incontournable !

Les chambres défendent les intérêts des groupes socio-professionnels qui sont ceux des agriculteurs, des artisans, des commerçants, des salariés et des fonctionnaires. Elles prennent position vis-à-vis du Gouvernement et des mesures que ce dernier envisage pour réaliser ses objectifs politiques ou pour répondre à des contraintes d’actualité socio-économique ou autres. Elles agissent en faveur de toutes les personnes physiques et morales actives dans le pays. Dès leur création en 1924, les chambres professionnelles ont ainsi fait partie du processus législatif que ce soit par leur droit d’initiative ou par leur mission consultative, s’ancrant de ce fait comme pilier de la cohésion et de la démocratie dans le modèle social national en permettant, via un système de représentativité élective, la participation directe de toutes les personnes actives, qui, depar leur activité, sont le moteur de toute l’économie nationale, à l’évolution sociale et politique du pays[1].

Bien que la proposition commune initiale faite par les cinq chambres professionnelles de mieux circonscrire les réalités décrites ci-dessus dans la Constitution n’ait pas trouvé d’écho lors de la rédaction et des remaniements du texte nouveau[2], le rôle et les missions des chambres sont à suffisance de droit décrites dans leurs lois constitutives et elles continuent à contribuer de manière renforcée à la garantie de la démocratie politique, sociale et économique, soit in fine, à la paix sociale.

  1. Une œuvre socio-culturelle

Certains voient dans la Constitution une œuvre esquissant le rêve d’un monde meilleur dont il s’agit de faire une réalité. La Constitution de 1848 était un rêve conçu par des parlementaires qui ont osé imaginer un autre avenir[3] A l’époque, il s’agissait notamment de se dégager, du moins partiellement, du régime autoritaire du Roi-Grand-Duc par la proclamation de libertés, telle la garantie de la liberté d’opinion, la liberté des cultes, la liberté de la presse, ou d’association ; et d’autres libertés qui sont venues s’y ajouter au fil du temps. La Constitution révisée de 2023, tout en soulignant son attachement aux réalités sociales appelle elle aussi à préparer l’avenir en proclamant par exemple de nouveaux objectifs à valeur constitutionnelle. En effet, une nouvelle section est introduite (art. 38 à 43) et annonce le droit à un logement approprié, le droit au travail, le droit à la protection de l’environnement humain et naturel y compris la sauvegarde de la biodiversité, la lutte contre le dérèglement climatique, l’accès à la culture et le droit à l’épanouissement culturel, la protection du patrimoine culturel, dont il n’y a qu’une chose à faire pour nous : faire de ce rêve une réalité[4].

La Chambre des Métiers confirme dans son avis du 9 juillet 2021 que la Constitution a vocation d’être à la fois le miroir et la boussole de notre société [5]. C’est dans ce contexte que la Constitution est une œuvre socio-culturelle dont il faut voir l’évolution du contenu à travers les siècles. Conçue au départ comme le texte garant de droits et de libertés collectifs au titre de protection vis-à-vis des pouvoirs[6], elle se veut désormais être le reflet d’une aspiration à des garanties de tout genre à donner par le pouvoir aux individus, tels les nouveaux objectifs à valeur constitutionnelle susmentionnés. [7]

  1. Une œuvre pragmatique

La Chambre des Métiers prend acte de ces objectifs et note que pour faire de ce rêve une réalité, le rôle de l’Artisanat est primordial. Premier employeur au Luxembourg (105 000 emplois soit 21% de l’emploi total au Grand-Duché), l’Artisanat est au cœur de la réalisation des objectifs posés par la Constitution révisée en matière de création de logement et d’emplois, de la transition écologique et de l’innovation. Le potentiel socio-économique du secteur se résume dans sa devise : « L’Artisanat construit l’avenir du Luxembourg » [8].

A ce titre, la Chambre des Métiers ne cessera pas de mettre en lumière les défis considérables auxquels le secteur se voit confronté et continuera d’en appeler à une grande proactivité de la part des autorités politiques en vue de favoriser un environnement socio-économique permettant à l’Artisanat de relever les défis susmentionnés. Bien que le texte de la Constitution actuelle soit le fruit d’un travail de longue haleine débuté en 2009, et de compromis (p.ex. distribution gratuite à tous les ménages à défaut de référendum), les multiples crises qui frappent l’économie doivent être traitées sans tarder.

Pour ce faire, et nonobstant les considérations critiques que les chambres professionnelles ont pu signaler à l’occasion de l’élaboration du texte de la Constitution luxembourgeoise réformée et qui s’avéreront probablement justifiées, la Chambre des Métiers exhorte les partis politiques, en particulier ceux appelés à diriger notre pays à l’issue des prochaines élections législatives du 8 octobre 2023, à promouvoir un cadre légal favorable à l’Artisanat. La Chambre des Métiers a émis 30 propositions concrètes pour répondre aux enjeux du secteur, renforcer la compétitivité des entreprises artisanales et améliorer le quotidien des artisans tout comme des citoyens en général[9] et exhorte les décideurs politiques à prendre en considération ces propositions à même d’apporter des solutions concrètes aux enjeux actuels et futurs auxquels est confrontée l’économie luxembourgeoise.

 

[1] Avis commun des chambres professionnelles du 20 juillet 2015, doc. parl. 6030/17, p. 2

[2] Dépêche des présidents des cinq chambres professionnelles au Président de la Commission des institutions et de la révision constitutionnelle, le 7 mars 2013, doc. parl. 6030/11, p. 30 et 31

[3] Notre Constitution, une œuvre d’art ; par Denis Scuto ; Tageblatt du 27 mai 2023

[4] Idem note 3

[5] Avis de la Chambre des Métiers du 9 juillet 2021, doc. parl. 7755/5, p. 22 et s.

[6] Les pouvoirs législatif, judiciaire et exécutif au sens de « L’esprit des lois » de Montesquieu (1689-1755), penseur politique qui distingue ces trois pouvoirs et qui a inspiré le principe de séparation des pouvoirs, aujourd'hui encore considéré comme un élément essentiel des gouvernements démocratiques.

[7] « Bien que les auteurs de la révision n’accordent pas de droit positif individuel à effet direct aux objectifs à valeur constitutionnelle, la Chambre des Métiers observe que certaines formulations utilisées commandent plus qu’ils ne recommandent », Avis de la Chambre des Métiers du 9 juillet 2021, doc. parl. 7755/5, p. 22 et s.

[8] 30 Propositions pour l’avenir de l’Artisanat et de la société luxembourgeoise, publié le 10.01.2023, www.cdm.lu

[9] Idem note 8