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Réduction du temps de travail ou innovations organisationnelles ? Une discussion à contresens

  • Publié le 22.05.2023

A la suite de la présentation en date du 25 avril 2023 par Monsieur le Ministre de l’Emploi et l’Economie sociale et solidaire Georges ENGEL d’une étude menée par le LISER et l’Université du Luxembourg relative aux enjeux et risques d’une réduction du temps de travail, la Chambre des Métiers souligne l’importance du débat sur un marché de l’emploi attractif au Luxembourg, mais déplore le choix politique de cantonner la discussion relative aux facteurs  d’attractivité y relatifs au simple « temps de travail ».


L’Artisanat considère qu’il s’agit maintenant plus que jamais de mener une réflexion nécessairement plus large quant à une organisation du travail résolument moderne tenant compte des possibilités d’ajustement et d’alignement des besoins des salarié(e)s et des entreprises. La diversité et l’hétérogénéité de ces besoins poussent les entreprises à modifier la dynamique de leur organisation du travail et nécessite, afin de répondre aux attentes, une modernisation fondamentale du Code du travail.

Si l’étude présentée hier ne permet pas de conclure définitivement sur la réduction du temps de travail comme véritable moyen d’attractivité du marché de l’emploi luxembourgeois, la Chambre des Métiers en conclut que le sujet isolé du temps de travail ne peut pas agir comme élément d’attraction. Il s’agit, aux yeux de la Chambre des Métiers, d’élargir le débat et de rehausser les ambitions pour réformer le droit du travail luxembourgeois en vue d’une plus grande attraction d’une main-d’œuvre qualifiée.

La Chambre des Métiers préconise ainsi une réforme fondamentale du droit du travail qui touche aussi bien l’organisation en soi du travail que le temps alloué à un travail nouvellement organisé, réforme se basant sur les éléments clés suivants :

  • Nouvelles formes flexibles d’emploi et de contrats de travail pour permettre aux entreprises de réagir rapidement aux fluctuations de la demande amplifiées par le rythme de l’innovation ;
  • Perfection de l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée du salarié(e) en phase avec les besoins de l’entreprise pour améliorer la compétitivité et l’attractivité du marché de l’emploi ;
  • Réforme dépourvue de nouvelles contraintes organisationnelles et charges financières pour les entreprises afin de soutenir l’entrepreneuriat luxembourgeois et son développement ;
  • Possibilités flexibles de personnalisation de l’organisation (du temps) de travail, accompagnée par une série de mesures qui traduisent l’impératif du point de rencontre entre les besoins de l’entreprise et du salarié(e) dans une perspective de productivité accrue.

L’ambition de dépoussiérer les dispositions actuelles du Code du Travail pour renforcer le dialogue social dans les entreprises rendra impérative la substitution de la législation afférente au plan d’organisation du travail (POT) dans sa forme actuelle par un système d’organisation plus maniable et adaptable aux réalités socio-économiques dans l’économie luxembourgeoise. Dans la mesure où un nouveau modèle d’organisation du travail permettrait aux salariés d’avoir une plus grande liberté dans l’organisation de leur équilibre vie professionnelle et vie privée tout en maintenant une stabilité dans leur emploi, un modèle plus flexible de l’organisation du travail permettrait de casser les rigidités du système actuel.

En ce qui concerne le temps du travail à proprement parler, la Chambre des Métiers préconise l’introduction d’un nouveau système d’aménagement du temps de travail sur base d’une période de référence qui excède le cadre hebdomadaire. Sur base du constat que dans la plupart des entreprises, l’activité fluctue à la hausse et à la baisse tout au long de l’année, un mécanisme de période de référence annuel permettrait de rencontrer cette réalité et d’adapter le rythme de travail de manière plus efficace pour toutes les parties prenantes.

Ce système d’aménagement de l’organisation du travail permet de mieux individualiser le planning du travail en fonction des besoins des salarié(e)s et des besoins de service. Cette personnalisation et planification plus individualisée peut intervenir à différents niveaux (secteur, entreprise, équipe, salarié) et impactera, par ricochet, bien évidemment également le temps de travail. Une telle approche de l’organisation du travail permet finalement d’encourager un véritable dialogue social entre salarié(e) et employeur, mettant en balance les besoins de l’entreprise et les besoins de vie professionnelle et vie privée du salarié(e) concerné.

En conclusion, un changement fondamental de l’organisation du travail au Luxembourg, fondé sur les prémisses d’une plus grande individualisation, flexibilité et adaptabilité, agirait, aux yeux de l’Artisanat, ainsi non seulement comme réponse à une demande patronale, mais également (et peut-être plus fondamentalement) comme réel moyen d’attraction des talents et de fidélisation des salariés, notamment au niveau de la Grande Région et au-delà.