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Le projet de budget de l’Etat 2014 : le calme avant la tempête?

  • Publié le 28.03.2014
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Au niveau de l’administration publique, le projet de budget table sur un excédent de l’ordre de 100 millions d’euros, imputable à la réduction du déficit de l’administration centrale et au surplus de recettes de la sécurité sociale ; une hausse du PIB de l’ordre de 3,2% est par ailleurs envisagée.

Aux yeux de la Chambre des Métiers, cette croissance semble optimiste. Elle souligne le risque que les recettes publiques soient surévaluées et l’ampleur du déficit sous-estimée.


1. Les mesures de consolidation du Gouvernement : un petit pas dans la bonne direction

Le volume des mesures de consolidation prévues est estimé modeste par la Chambre des Métiers puisqu’il n’est que de 231 millions d’euros (contre plus de 900 millions en 2013).

Par ailleurs, une stratégie concernant la politique à mener en matière de finances publiques sur les années à venir n’est pas (encore) perceptible.

Si la Chambre de Métiers conçoit que le nouveau Gouvernement ne disposait que de trois mois pour  préparer le projet de budget de l’Etat, et que de fait peu de mesures d’assainissement des finances publiques seront mises en œuvre en 2014, elle insiste sur la nécessité d’implémenter en 2015 des mesures de consolidation autrement plus incisives, notamment au vu des pertes de recettes de TVA en provenance du commerce électronique.

Elle est donc d’avis que le projet de budget 2014 est un budget «de transition», repoussant d’une année l’essentiel des efforts d’assainissement des finances publiques.

La Chambre des Métiers approuve la compression des frais de fonctionnement qu’elle revendique d’ailleurs depuis des années, même si l’objectif initial du Gouvernement d’une réduction de 10% n’a pas été atteint.
Pour des raisons liées notamment à la compétitivité de l’économie, des baisses du volume des investissements publics devront être opérées avec la plus grande prudence.

Elle constate qu’en dépit des mesures de consolidation affectant les investissements, ceux-ci demeurent élevés.

En revanche, la Chambre des Métiers souligne que la limitation du nombre de recrutements dans la fonction publique peut difficilement être interprétée comme mesure de consolidation, puisque chaque recrutement est synonyme de hausse des dépenses, mais elle approuve la réforme des bourses d’études, réforme qui introduit notamment des critères de sélectivité et de mobilité.

2. Relèvement des taux de TVA : un mal nécessaire?

La Chambre des Métiers insiste sur une communication sans délai de la date de mise en vigueur du relèvement des taux de TVA afin que les entreprises bénéficient d’un temps nécessaire de planification (adaptation des logiciels comptables ou d’établissement des devis, impression de nouvelles listes de prix, etc.)

Si, d’une manière générale, elle s’oppose à des hausses d’impôts en raison de leurs effets défavorables sur l’économie et qu’elle privilégie la voie d’une réduction des dépenses pour assainir les finances publiques, elle peut comprendre la mesure de relèvement des taux de TVA en l’espèce, au vu des pertes de revenus de cette taxe issus du commerce électronique.

Néanmoins, elle rappelle que ceci aura des effets défavorables sur l’économie. En effet, non seulement la hausse des taux de TVA rétrécit le pouvoir d’achat des ménages, mais en plus elle risque de pénaliser doublement les entreprises, qui soit la répercuteront sur leurs prix de vente, soit procèderont à une réduction de leurs marges d’ores et déjà impactées par la crise, ce qui en toute hypothèse dégradera la compétitivité des entreprises résidentes par rapport aux entreprises étrangères.

A noter en outre que la hausse des prix résultant du relèvement des taux de TVA accélérera l’inflation et rapprochera, en principe, l’échéance d’une tranche indiciaire, ce qui aura pour effet une hausse plus rapide des coûts salariaux.

La Chambre des Métiers exige donc, dans tous les cas, une neutralisation de la hausse des taux de TVA au niveau de l’échelle mobile des salaires, indépendamment de la date d’entrée en vigueur de cette mesure.

3. Les pistes de consolidation proposées par la Chambre des Métiers

La Chambre des Métiers propose que dans le cadre de la radioscopie des dépenses que le Gouvernement entend réaliser, des efforts supplémentaires soient déployés en vue de comprimer davantage les frais de fonctionnement.

Par ailleurs, elle estime que des doutes sont permis en ce qui concerne l’efficacité d’une politique de redistribution qui absorbe des moyens financiers impressionnants si, en parallèle, le taux de risque de pauvreté augmente au fil des années. Pour cette raison, elle rappelle revendiquer depuis des années une politique de transferts sociaux plus sélective.

Parfaitement consciente du fait qu’en période de rigueur budgétaire, la politique d’investissement de l’Etat doive également être passée au peigne fin, la Chambre des Métiers est d’avis qu’il faut accorder une priorité aux investissements ayant pour effet de promouvoir le développement économique du pays, introduire une standardisation accrue des projets de construction de l’Etat et une meilleure coordination entre les acteurs, contribuant ainsi à une hausse de la productivité et à une compression des coûts.
Elle estime de surcroît que la priorité absolue des responsables politiques devrait consister à éviter que des personnes ne glissent dans une situation de chômage, ce en améliorant le système éducatif et la qualification des jeunes. Dans la même lignée, concernant la responsabilisation des demandeurs d’emplois, elle accueille favorablement la volonté de redéfinir la notion d’ «emploi approprié».

La Chambre des Métiers demande par ailleurs l’introduction de la désindexation de l’économie, c’est-à-dire des contrats de service, des loyers, des salaires et prestations de tous genres, ce qui devrait avoir pour effet de freiner la progression des dépenses publiques.

Dans l’optique de mieux maîtriser la hausse continue de la masse salariale dans la fonction publique, elle recommande d’optimiser la gestion des ressources humaines, notamment en analysant l’opportunité du remplacement des départs à la retraite et de freiner l’évolution des coûts salariaux individuels en ajustant davantage les salaires d’entrée dans la fonction publique.

La Chambre des Métiers insiste en outre sur l’urgence des réformes structurelles à implémenter au niveau des régimes de pension, d’assurance-maladie et d’assurance-dépendance.

Si elle salue les efforts déployés par le nouveau Gouvernement visant à améliorer la procédure budgétaire et son suivi, elle invite les auteurs à aller plus loin qu’une simple limite des recrutements supplémentaires, ce afin d’entamer une réforme de l’Etat, notamment en mettant en œuvre les recommandations de l’OCDE.
La lutte contre le dumping social revêt une importance non négligeable du fait que cette pratique met en péril la survie des entreprises respectueuses des exigences légales et permet à l’Etat de générer des recettes supplémentaires.

Selon la Chambre des Métiers, une autre manière de contribuer à l’assainissement des finances publiques serait de stimuler la croissance économique, elle-même génératrice de recettes publiques supplémentaires.
Le nouveau Gouvernement pourrait ainsi se donner un agenda visant à implémenter une politique économique en ce sens et s’articulant autour des axes suivants :

  • Garantie de la prévisibilité du cadre fiscal, importante pour les investisseurs potentiels, soucieux de pouvoir rentabiliser leurs investissements à long terme et amélioration de la compétitivité «fiscale» par rapport aux pays concurrents ;
  • Maintien des niveaux de cotisations sociales peu élevés pour demeurer compétitifs au niveau des salaires ;
  • Réduction des charges administratives afin de diminuer les coûts «non productifs» des entreprises (p. ex. exigences en matière d’étiquetage touchant de manière disproportionnée les entreprises de l’alimentation de taille (très) réduite) et simplification des procédures d’autorisation dans le domaine de l’urbanisme et de l’environnement;
  • Promotion offensive du Luxembourg à l’étranger.